A l’approche de la fin d’année, nous avons sollicité les partenaires sociaux pour avoir leur point de vue sur l’avenir du CPF en 2023. Découvrez la tribune de Jean-François Foucard, Secrétaire national, Parcours professionnel, Emploi, Formation à la CFE-CGC.
Quels remèdes au sous-financement de la formation professionnelle ?
“Depuis la loi de 2018, la formation professionnelle est structurellement déficitaire. Le déficit global fin 2022 atteint plus de 11 milliards, dont 2 milliards uniquement pour l’année 2022 bien que l’État ait fait un versement exceptionnel de 4 milliards. Globalement, avec un budget annuel de prés de 10 milliards, le déficit structurel atteint désormais 6 voire 7 milliards par an, soit entre 60 et 70 % de dépassement.
Pour la CFE-CGC, la première chose à faire, c’est que l’État assume sa responsabilité et affecte les sommes nécessaires dès le budget initial afin de ne pas contraindre les autres dispositifs et notamment les dispositifs de transition professionnelle. En effet, la loi précise que tout contrat d’apprentissage est financé par l’état ainsi que le CPF. Avoir des ambitions de 1 millions d’alternants et de développement de l’appétence des citoyens à la formation via l’utilisation du CPF oblige l’état à mettre beaucoup plus de moyens s’il veut d’être cohérent et mettre ainsi en adéquation ambitions et ressources.“
Quel avenir pour le CPF ?
“Pour ce qui concerne le CPF, plusieurs axes peuvent être envisagés, notamment pour que les sommes mobilisées aient une vraie plus-value, influent sur le parcours des personnes qui le mobilisent.
Pour la CFE-CGC, il faut d’abord revenir à la philosophie initiale du dispositif paritaire, c’est-à-dire que le CPF soit utilisé pour acquérir un bloc de compétence, un complément lié à un métier mais pas pour une reconversion lourde. Pour cela, il y a d’autres dispositifs.
Pour ce qui concerne le répertoire spécifique, il nous semble important de réintroduire au moins une catégorie de valeur professionnelle (pour mémoire avant 2018, il y avait 3 catégories : les obligations réglementaires ; les certifications de compétences transversales, les certifications complémentaires à un métier).
Ensuite, il faut restreindre la mobilisation de la partie mutualisée du CPF pour la valeur professionnelle du répertoire spécifique et sur les diplômes/certifications du RNCP dont la durée, sans complément d’un autre dispositif ou un abondement, est compatible avec la durée normale d’un CPF.
La volonté d’introduire un reste à charge par le Gouvernement pour faire baisser la consommation est une vision purement financière et courtermisme. Car déjà que le CPF est de base en dehors du temps de travail, s’il y a du reste à charge les personnes aux faibles revenus ne devraient plus le mobiliser. Donc dans un premier temps cela devrait freiner la consommation comme il le souhaite. Mais de façon générale, dans un deuxième temps, cela devrait plutôt restreindre drastiquement l’offre aux seules formations ayant une vraie plus-value sur le marché du travail.
Enfin, si la co-construction se développe comme l’état le préconise, alors la consommation actuelle devrait fortement augmenter pour au moins doubler. Car si la co-construction devrait permettre de garantir l’utilité des formations suivies pour le parcours professionnel de la personne concernée, elle ne garantit en rien la baisse des dépenses… bien au contraire. Donc cette mesure de reste à charge devrait plutôt à terme favoriser les formations dont la qualité et la pertinence sont reconnues sur le marché du travail que de faire des économies tout en excluant de fait sur la mobilisation autonome une partie de la population qui justement était la cible initiale !”