Tout le monde n’est pas en vacances et Monsieur GILLE, Vice-président de la commission des affaires sociales a répondu aux questions de CPFormation, interview :
CPFormation : Bonjour Monsieur Gille. Pouvez-vous vous présenter ?
Nous vous avons la première fois rencontré lors des réunions de présentation de la réforme organisées par DEFI METIER en 2014. Vous êtes le seul député à avoir eu la politesse de répondre à l’email envoyé par Jonathan GAUTRAND Président de METRO’FORMA, quel est votre lien avec cette réforme ?
Professionnellement, j’ai été successivement chargé de mission emploi formation sur l’agglomération de Tours puis j’ai travaillé à la région Centre comme chargé de mission sur la formation.
Depuis 2007, je suis député d’Indre-et-Loire et vice-président de la commission des affaires sociales. A ce titre, je suis particulièrement les questions d’emploi, d’emploi des jeunes et de formation professionnelle. C’est ainsi que je me suis retrouvé en février 2015 rapporteur pour l’Assemblée nationale de la loi sur la formation professionnelle, l’emploi et la démocratie sociale. Mon objectif était que cette loi établisse le droit concret à la formation à tous et tout au long de la vie. Ce qui a été fait. Cette loi représente une véritable révolution dans le monde de la formation, elle le transforme en profondeur et l’adapte aux enjeux d’aujourd’hui.
CPFormation : Le 4 mars 2013, François Hollande déclarait à Blois “Est-ce que c’est raisonnable d’avoir 55.000 organismes de formation ?” Selon vous quel serait un nombre raisonnable d’ organismes de formation ?
Comme vous le savez, la formation est un marché et ce n’est pas au gouvernement ni au législateur de déterminer le nombre d’intervenants de formation.
Le nombre souvent cité de 55 000 ne me semble pas correspondre à la réalité des organismes exerçant régulièrement une activité.
La loi a prévu de responsabiliser les acheteurs de formation sur la qualité des formations et donc des organismes de formation, ce qui me semble-t-il devrait amener progressivement à la disparition de certains organismes qui ne sont pas au niveau.
CPFormation : Avec le CPF, le salarié aura droit à des formations longues et titrées, ces formations sont jugées par Jean-Paul Charlez président de l’Association Nationale des DRH (ANDRH) comme incohérentes avec la demande réelle, qu’en pensez-vous ?
Il faut bien comprendre que dans la réforme, il y a deux aspects. D’abord une réforme des financements qui met fin à l’obligation légale de dépenser pour lui substituer une obligation de former. Autrement dit, les entreprises ont une large liberté pour former en fonction de leurs besoins. Deuxième aspect, le compte personnel de formation appartient aux salariés et aux demandeurs d’emploi ; c’est un outil pour qu’ils se forment dans la durée. C’est pourquoi les partenaires sociaux ont choisi de privilégier les formations qualifiantes. Au final, l’objectif du CPF est de progresser dans sa vie professionnelle d’un niveau de qualification. Le CPF est aussi une capacité d’initiative du salarié pour sa formation, lui permettant d’avoir une négociation avec sa DRH.
CPFormation : Les OF ont-ils les moyens de rendre certifiantes ou diplômantes les formations peu demandées ? Quelle est la procédure et le coût pour rendre une formation titrée ?
Ce qui est certain c’est que les organismes de formation doivent adapter leur offre au CPF et notamment modulariser les formations qualifiantes. Il faut aussi que se développent les certifications partielles ou intermédiaires ouvrant la possibilité d’obtenir une qualification par étape.
CPFormation : Vous qui êtes spécialiste des questions de formation professionnelle et d’emploi des jeunes, que pensez-vous de la mise en place de la réforme de la formation professionnelle ?
Bien sûr tout n’est pas parfait car il faut du temps pour tout mettre en place et faire en sorte que, sur le terrain, la loi s’adapte à tous. Cette loi transforme en profondeur le monde de la formation, il est normal qu’il y ait des tensions et des points à corriger. Cela va se faire progressivement, au cas par cas. Mais regardez ce qui a déjà été fait : tout le dispositif était bien en place le 1er janvier, seule l’élaboration des listes retarde un peu le système.
CPFormation : Qu’est-ce qui vous fait penser que seule la transition est difficile, et que le CPF sera une réussite, au vu des 6 mois que nous venons de connaître ?
La réforme est systémique et elle transforme profondément les us, les pratiques et les procédures habituelles. Pourquoi ? Parce qu’elle bouleverse les habitudes et les modes de financement. Des formations jusqu’alors financées dans le plan de formation devront être prises en charge dans le CPF. A contrario toute une série de petites formations qui étaient prises en charge dans le cadre du DIF ces dernières années ne pourront plus être prises en charge que par le plan de formation. Enfin et surtout l’offre de formation doit évoluer en séparant clairement ce qui est de l’ordre du qualifiant et du certifiant, avec les autres formations qui sont de l’ordre de l’adaptation. Surtout, l’offre de formation qualifiante et certifiante, pour que le CPF réussisse, doit être modularisée et la certification elle-même doit être modularisée.
Dit autrement, la réussite du CPF ce sera souvent une VAE suivie, si elle n’est pas totale, de la préparation et de la certification des modules restant à acquérir.