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Le CPF finance le permis des citadins : un paradoxe face à l’accessibilité des transports en commun

Le Compte Personnel de Formation (CPF) est un dispositif en pleine expansion en France, qui permet aux salariés et demandeurs d’emploi de financer des formations professionnelles. Selon l’étude n° 40 de la Caisse des Dépôts de mars 2023, ce dispositif connaît une augmentation significative de son utilisation depuis son lancement en novembre 2019. Cependant, un constat surprenant se dégage : le CPF finance majoritairement le permis de conduire des citadins, qui disposent pourtant d’un accès facile aux transports en commun. Ce paradoxe soulève la question de la pertinence de financer le permis de conduire dans les zones urbaines denses.

En effet, l’étude révèle que les taux de recours au CPF varient du simple au double entre les territoires les moins denses et les plus denses. Le recours au CPF pour financer le permis B est particulièrement élevé dans les espaces urbains denses, représentant 19% des bénéficiaires, contre seulement 3% dans les zones rurales. Ces chiffres interrogent sur la logique d’investir dans le permis de conduire pour les citadins, qui bénéficient généralement d’un réseau de transports en commun développé.

Permis de conduire et CPF : peut-on parler de détournement des fonds de la formation ?

Cette situation semble d’autant plus surprenante que les formations financées par le CPF dans les zones rurales sont davantage liées à l’exercice d’un métier précis. Cela soulève la question de l’adéquation entre les besoins des bénéficiaires et les formations financées par le dispositif.

La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 relative à la liberté de choisir son avenir professionnel a pour objectif de faciliter la mobilité des salariés et demandeurs d’emploi en leur permettant de mobiliser librement leurs droits à la formation acquis lors de leur parcours professionnel. Néanmoins, ces données suggèrent que l’éligibilité du permis de conduire au CPF pourrait être repensée, afin de favoriser la mobilité dans les zones où les transports en commun sont moins accessibles, et d’encourager l’utilisation de ces derniers dans les zones urbaines denses.

Face à ce constat, il est nécessaire de réfléchir à la manière dont le CPF peut être utilisé plus judicieusement pour répondre aux besoins spécifiques des bénéficiaires en fonction de leur lieu de résidence et des enjeux de mobilité propres à chaque territoire. Cela pourrait passer par une meilleure orientation des bénéficiaires vers des formations adaptées à leur contexte géographique, ou encore par une redéfinition des critères d’éligibilité des formations financées par le CPF.

Afin de remédier à cette situation et d’optimiser l’utilisation du CPF, plusieurs pistes pourraient être explorées :

  1. Adapter l’éligibilité du permis de conduire au CPF en fonction des zones géographiques : Il serait pertinent de revoir les conditions d’éligibilité du permis de conduire en fonction des besoins spécifiques de chaque territoire. Par exemple, dans les zones rurales où les transports en commun sont moins développés, il est essentiel de faciliter l’accès au permis de conduire pour améliorer la mobilité des individus. Dans les zones urbaines denses, en revanche, il pourrait être plus judicieux de promouvoir d’autres types de formations liées à la mobilité, telles que la conduite de véhicules électriques ou l’apprentissage du covoiturage.
  2. Sensibiliser les citadins à l’utilisation des transports en commun : Les pouvoirs publics et les organismes de formation pourraient collaborer pour promouvoir l’utilisation des transports en commun auprès des citadins. Des campagnes d’information et de sensibilisation pourraient être mises en place pour encourager les bénéficiaires du CPF à privilégier les transports en commun, en soulignant leurs avantages en termes de coût, de temps et d’impact environnemental.
  3. Favoriser les formations en lien avec les métiers en tension : Le CPF pourrait être orienté davantage vers des formations liées aux métiers en tension et aux compétences recherchées par les entreprises. Cela permettrait non seulement de répondre aux besoins du marché du travail, mais aussi d’offrir des perspectives d’emploi plus concrètes aux bénéficiaires.
  4. Mettre en place un accompagnement personnalisé : Pour mieux orienter les bénéficiaires du CPF dans leurs choix de formation, un accompagnement personnalisé pourrait être proposé. Cela permettrait d’identifier les besoins spécifiques de chaque individu en fonction de son lieu de résidence, de son parcours professionnel et de ses aspirations, afin de l’orienter vers les formations les plus pertinentes.

Le permis de conduire : un détournement des fonds de formation ? Le Compte Personnel de Mobilité comme solution

Le Compte Personnel de Mobilité (CPM) est une initiative ressente et innovante proposée par l’UNIDEC pour financer la mobilité des individus sans impacter les fonds destinés à la formation professionnelle. Contrairement au Compte Mobilité, qui encourage les modes de transport durables, le CPM se concentre sur la mobilité individuelle et pourrait fonctionner grâce aux contributions des employeurs et des pouvoirs publics.

Les deux dispositifs pourraient être complémentaires pour inciter à adopter des modes de déplacement écologiques et faciliter l’accès aux formations professionnelles. Le CPM pourrait ainsi permettre de résoudre les problèmes liés à l’utilisation des fonds du CPF pour financer la mobilité, tout en préservant les ressources consacrées à la formation professionnelle et en contribuant au développement durable.

Conclusion

Le Compte de Formation est un dispositif précieux pour la formation et la mobilité des Français, mais il est nécessaire de l’ajuster afin de mieux répondre aux besoins spécifiques de chaque territoire et de chaque bénéficiaire.

Une réflexion approfondie sur les critères d’éligibilité et les priorités en matière de formation doit être menée pour garantir une utilisation optimale du CPF et contribuer à une mobilité durable et responsable sur l’ensemble du territoire national.

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