Site icon CPFormation

PLF 2026 : le bilan de compétences maintenu au CPF… mais bientôt plafonné ? Décryptage d’un virage encore flou

Dans la nuit du 6 au 7 décembre 2025, le Sénat a adopté plusieurs dispositions importantes du Projet de loi de finances 2026 concernant le Compte personnel de formation. Parmi elles, une évolution notable : le bilan de compétences, confirmé comme éligible au CPF, pourrait désormais être plafonné par décret.

Le dispositif n’est pas supprimé, ni remis en question dans son principe.
Mais son modèle économique, lui, pourrait évoluer de manière significative.

Voici ce que contient réellement le texte, ce qu’il ne dit pas, et ce que les acteurs devront surveiller dans les prochains mois.


1. Le texte voté : maintien de l’éligibilité + possibilité de plafonnement

Le Sénat a réintroduit la possibilité de financer un bilan de compétences via le CPF, alors que le texte initial envisageait un resserrement.

Toutefois, il ajoute désormais une phrase clé, via l’article 81 :

« Un décret peut fixer un plafond de droits mobilisables pour les actions de bilan de compétences. »

Cette rédaction crée un cadre nouveau :

Rien n’est fixé pour l’instant :
ni le montant, ni la méthode de calcul, ni la date d’entrée en vigueur.


2. Une question immédiate : plafonner, mais à quel niveau ?

Plafonner un prix pose une question simple mais incontournable : plafonner quoi, et pourquoi ?

Le texte ne précise pas :

Pourquoi pas un minimum ?

Historiquement, le marché du bilan de compétences a déjà connu des dérives :

Un plancher de qualité aurait autant de sens qu’un plafond.

Créer uniquement un plafond, sans minima qualitatif, risque de :


3. Plafonner ne garantit pas moins de consommation, ni moins de dépenses

L’objectif implicite de tout plafonnement est souvent budgétaire.
Mais l’histoire récente montre que :

En réalité, deux phénomènes sont largement observés dans les systèmes régulés :

1. L’effet « plafond = prix cible »

La majorité des prestataires s’alignent exactement sur le montant maximal.
Autrement dit, un plafond devient rapidement un prix unique national, pas un instrument de baisse.

2. L’effet de seuil : aucune garantie d’économie

Si un bilan coûte aujourd’hui 1 800 € et qu’un plafond est fixé à 1 700 €, cela ne changera rien :

Ce point est bien connu : plafonner ne maîtrise pas nécessairement la dépense.


4. Une distorsion de concurrence potentielle entre RS et RNCP

Le bilan de compétences est inscrit au Répertoire spécifique (RS).
Plafonner une action du RS, sans plafonner les actions du Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP), crée un déséquilibre :

Conséquence probable : des stratégies de requalification

Les acteurs du secteur risquent de :

Ce déplacement de l’offre ne contribuerait pas à la transparence du secteur, et pourrait au contraire fragiliser la logique du CPF.

Historiquement, lorsque seule une partie du marché est régulée, le marché se déplace vers la zone non régulée.
C’est l’un des effets les plus documentés en économie réglementaire.


5. Le risque de revenir à des pratiques d’avant 2021

Avant le renforcement des règles CPF, certains organismes contournaient les restrictions :

Un plafonnement uniquement sur le bilan pourrait paradoxalement :

Le régulateur cherchait ces dernières années à mettre fin à ces pratiques.
Un plafonnement partiel risque de les relancer indirectement.


6. Pourquoi plafonner le bilan de compétences ? Sur quelle base empirique ?

Le texte voté par le Sénat invoque des objectifs généraux :
maîtrise des coûts, encouragement de la co-construction, recentrage des usages.

Mais une question demeure : quelle est la base empirique justifiant spécifiquement un plafonnement du bilan de compétences ?

À ce jour :

Par ailleurs, de nombreuses dérives du CPF observées depuis 2019 concernaient :

… sans que le bilan ne soit pointé comme une source majeure de difficulté.

Réguler uniquement cette action interroge donc :

Aucune réponse n’apparaît encore dans le débat public.


Conclusion : un dispositif maintenu, mais des zones d’incertitude majeures

Le bilan de compétences reste accessible via le CPF : c’est un point important et clairement affirmé par le Sénat.
Cependant, l’introduction d’un plafonnement par décret ouvre une nouvelle phase de régulation, dont les objectifs et les modalités restent encore à définir.

Plusieurs questions restent ouvertes :

Pour l’heure, rien n’est arrêté.
La navette parlementaire et les décrets à venir préciseront le cadre définitif.

CPFormation continuera à suivre très attentivement l’évolution de ce dossier et à analyser, les implications pour les actifs, les entreprises et les professionnels du secteur.

Quitter la version mobile