Il sera bientôt possible de passer son permis moto au CPF. Non ce n’est pas une blague du 1er avril mais une proposition de loi portée par le député Renaissance Sacha Houlié visant à faciliter le passage et l’obtention de l’examen du permis de conduire et élargissant ce droit d’utiliser son CPF au permis moto.
À l’Assemblée nationale, l’ordre du jour de la séance du 27 mars 2023 portait sur la discussion de la proposition de loi visant à faciliter le passage et l’obtention de l’examen du permis de conduire. M. Sacha Houlié, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République a rappelé en introduction la finalité de la proposition : un « permis de conduire plus simple, plus rapide et moins cher ».
Prise de parole de Sacha Houlié
“Pour ce faire, nous formulons trois propositions.
La première consiste à tirer toutes les conséquences du plan « 1 jeune, 1 solution », qui a été très bien accueilli et a fonctionné remarquablement. Pourquoi ne pas créer une plateforme « 1 jeune, 1 permis », qui permettrait à chacun de connaître en quelques clics toutes les aides disponibles – aides de l’État, des établissements publics et des collectivités –, en renseignant simplement son code postal ? C’est la disposition proposée à l’article 1er. Cette plateforme aurait par ailleurs vocation à être coordonnée avec celle qui recense les auto-écoles labellisées, avec les différents sites déjà mis à disposition par le ministère de l’intérieur et des outre-mer, et avec le système RdvPermis, généralisé depuis le 1er mars, qui permet désormais de prendre rendez-vous pour passer le permis de conduire.
La deuxième disposition concerne le compte personnel de formation (CPF), qui rencontre lui aussi un succès remarquable : le permis de conduire représente ainsi le plus gros volume d’achats effectués sur la plateforme MonCompteFormation, avec 320 000 formations par an, soit 28 % des permis délivrés en 2021. Ce système ayant fait ses preuves, nous estimons qu’il pourrait être étendu à d’autres permis, notamment au permis de catégorie A2, dit « gros cube », pour ceux qui se déplacent en milieu urbain ; aux permis permettant de conduire une voiturette ou une petite moto, pour les plus jeunes ; voire aux permis permettant de tirer une remorque, pour les artisans. Le Gouvernement pourrait même aller plus loin en synchronisant les financements perçus grâce au CPF avec l’aide de 500 euros destinée aux apprentis. Il reprendrait ainsi à son compte une mesure que nous avions proposée mais qui a été déclarée irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution – dont le respect a été assuré avec une parfaite rigueur pour ce texte, ce que je tiens à saluer.
Dernière proposition, et non des moindres : comme je l’ai indiqué, les délais nécessaires au passage du permis de conduire constituent un obstacle. Les inspecteurs du permis de conduire, qui sont déjà 1 280 en France, seront plus nombreux encore après l’entrée en vigueur du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), qui prévoit le recrutement de cent inspecteurs supplémentaires en quatre ans. Le nombre d’examinateurs a également augmenté grâce à la convention passée avec La Poste après l’adoption de la loi Macron. Toutefois, ils pourraient être plus nombreux encore si nous adoptions l’article 3, qui prévoit de permettre le recrutement de nouveaux examinateurs ou inspecteurs du permis de conduire – formés respectivement pendant deux mois et six mois – parmi les agents publics contractuels ou titulaires de la fonction publique d’État ou de la fonction publique territoriale. Ces derniers renforceraient ainsi la cohorte des inspecteurs du permis de conduire, ce qui permettrait de proposer davantage de créneaux d’examen, donc de réduire d’autant le délai d’attente pour obtenir le permis de conduire.”
CPF et permis moto : quel argument pour élargir le CPF à tous les permis ?
Sonia Backès, Secrétaire d’État chargée de la Citoyenneté nous éclaire dans sa prise de parole faite lors de la séance du 27 mars 2023 :
“Le CPF ne peut, pour l’heure, être utilisé que pour préparer le passage des permis permettant de conduire des voitures, des poids lourds et des transports en commun. Après l’adoption de la proposition de loi, ce mode de financement sera étendu aux motos légères ou puissantes – catégories A1, A2 et A –, aux voiturettes sans permis – permis B1 – ou encore aux examens autorisant les titulaires d’un permis B à tracter des remorques plus lourdes – permis B96 et BE.
La prise en charge par le CPF de la préparation à l’examen de conduite présente un réel intérêt pour qui souhaite réaliser un projet professionnel ; elle favorise la sécurisation du parcours professionnel du titulaire du compte. L’une des grandes conquêtes de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel (loi LCAP) est d’avoir fait en sorte, grâce au CPF, de réellement démocratiser l’accès à la formation professionnelle en l’étendant aux femmes, aux ouvriers et aux employés. Le CPF tient désormais une place de plus en plus centrale dans l’aide au financement du permis de conduire. Ainsi, en 2021, sur 1,12 million de permis de conduire délivrés en France, 322 000, soit près d’un tiers, ont été souscrits par l’intermédiaire du CPF.
Nous sommes convaincus que l’élargissement du financement du permis de conduire à d’autres catégories de véhicules, comme les motos légères, peut constituer un levier d’autonomie et d’insertion professionnelle, notamment pour les plus jeunes habitant en zone rurale. Il est toutefois nécessaire de préciser les modalités de mise en œuvre de cet élargissement, en prenant le temps de consulter les partenaires sociaux.
Le Gouvernement présentera donc un amendement, no 80 rectifié, prévoyant une date d’entrée en vigueur différée, qui permettra cette consultation et donnera le temps à la Caisse des dépôts (CDC) d’assurer les développements techniques nécessaires pour étendre le champ des permis de conduire finançables par le CPF. Un décret précisera en outre plusieurs points très importants, comme le fait que les personnes faisant l’objet d’une suspension ou d’un retrait de permis ne pourront pas accéder à ce financement. “
CPF ouvert à tous les permis : mais pourquoi ?
Alors que le Gouvernement alerte sur les dépenses du CPF et tente de faire passer un « reste à charge » obligatoire pour tout apprenant mobilisant son CPF (hors demandeurs d’emploi), il peut être légitime de s’interroger sur cette proposition de loi.
Les salariés ont certes besoin de gagner en mobilité pour certains, mais ne faut-il pas concentrer les efforts et les financements du CPF sur la montée en compétences professionnelles ? Avec l’élargissement à tous les permis de conduire, le Gouvernement ne dénature-t-il pas encore plus l’objet du CPF ? Conduire une moto ou une voiturette va-t-il permettre à des salariés ou demandeurs d’emploi d’être employables, de se reconvertir, d’enrichir leurs compétences ? Pourquoi ne pas créer une aide financière spécifique au permis de conduire en dehors du financement prévu pour la formation professionnelle ? Le message serait plus clair sur la volonté de rendre le permis accessible au plus grand nombre… sans pour autant flécher les dépenses correspondantes au domaine de la formation.
Le texte visant à faciliter le passage et l’obtention de l’examen du permis de conduire a donc été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale et va désormais être transmis au Sénat.
A suivre !