Depuis la loi de 2018 pour la « Liberté de choisir son avenir professionnel », la formation professionnelle a connu une profonde transformation : explosion de l’apprentissage, diversification de l’offre, arrivée massive d’acteurs privés… mais aussi une multiplication des abus.
Entre formations de qualité inégale, promesses mensongères, manque d’habilitations et fraudes ouvertes, l’État lance en 2025 un plan inédit, interministériel, structurant, avec un objectif clair : tolérance zéro et recentrage sur la qualité et l’utilité réelle des formations.
🎯 Objectifs généraux du plan 2025
Ce nouveau plan de réforme est porté conjointement par les ministères du Travail, de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur. Il repose sur une logique de coopération entre tous les acteurs publics concernés, et s’inscrit dans une volonté ferme de transparence, d’efficacité et de tolérance zéro face aux abus.
L’objectif est double : garantir à chacun une formation réellement utile et protéger les financements publics contre les détournements. Le cœur de cette réforme repose sur quatre piliers : la qualité des formations, la protection des usagers, la régulation des organismes et la lutte contre la fraude.
Renforcer la qualité des formations : vers un encadrement plus strict des organismes
Le plan 2025 introduit un ensemble de mesures destinées à améliorer la qualité des formations proposées aux apprenants. Il impose de nouvelles obligations aux organismes préparant à des certifications professionnelles. Ceux-ci devront désormais respecter l’ensemble du référentiel de compétences, utiliser des moyens pédagogiques adaptés, et présenter de façon honnête les débouchés réels. Le décret du 6 juin 2025 encadre précisément les critères d’habilitation, tant pour la formation que pour l’évaluation. France compétences sera chargée de vérifier notamment les taux de réussite et de présentation à l’examen.
Une réforme importante concerne les formations préparant aux diplômes du CAP au BTS : elles devront désormais faire l’objet d’une habilitation préalable délivrée par les rectorats. Ce changement permettra un meilleur contrôle de la qualité des contenus dispensés. Les DREETS, la Caisse des dépôts ou les OPCO pourront appuyer cette mission.
Le plan prévoit aussi de lutter contre les formations qui servent de couverture à des logiques d’emprise ou mènent à l’exercice illégal de professions réglementées. Les services de contrôle devront s’assurer que les objectifs sont strictement professionnels, que les prérequis sont adaptés, et que le déroulé de la formation respecte l’égalité entre tous les apprenants.
Enfin, les CFA (centres de formation d’apprentis) verront leurs missions élargies. Ils seront mobilisés sur deux priorités : la prévention des accidents du travail, auxquels les jeunes sont particulièrement exposés, et la lutte contre l’illettrisme, qui touche environ 5 % des jeunes selon les données de la JDC. Ces deux axes visent à sécuriser davantage les parcours de formation et à améliorer les chances de réussite pour tous.
Mieux informer et protéger les jeunes et les actifs : des mesures concrètes pour un secteur plus lisible et plus sûr
Aujourd’hui, le monde de la formation professionnelle est souvent perçu comme difficile à comprendre. Pour les jeunes comme pour les actifs, il est parfois compliqué de s’y retrouver entre les nombreuses offres, les différents organismes et les démarches à suivre. Le plan de réforme lancé en 2025 veut donc rendre ce secteur plus clair, plus sûr et plus équitable.
Tout d’abord, des mesures sont prévues pour mieux encadrer les contrats d’apprentissage. Certains établissements demandent aux étudiants de payer des frais pour réserver leur place, parfois très tôt, sans possibilité de remboursement. Cela limite leur liberté de choisir une autre formation si besoin. Avec la nouvelle loi, ces pratiques seront interdites. Les étudiants pourront également annuler leur inscription sans frais jusqu’à trente jours avant le début de leur formation. Ces changements leur permettront de faire un choix plus serein, sans pression financière.
Ensuite, l’information sur les formations sera renforcée. Il est essentiel que chaque personne sache si la formation qu’elle envisage débouche réellement sur un emploi. Pour cela, les indicateurs InserJeunes et InserSup seront mieux utilisés. Ils donnent des données fiables sur l’insertion professionnelle, les salaires après la formation, ou encore le taux de réussite. Ces informations seront mises à jour et rendues plus accessibles, notamment pour les formations privées qui ne sont pas encore bien suivies. D’ici fin 2026, les organismes de formation ne pourront plus utiliser leurs propres chiffres : ils devront se baser uniquement sur les données officielles fournies par l’État.
Enfin, il est aussi prévu d’améliorer les outils de signalement. Si un étudiant rencontre un problème avec sa formation, il peut déjà s’adresser à différents services comme la DGCCRF, les inspections du travail ou les financeurs. Mais beaucoup de jeunes ne savent pas à qui s’adresser. Pour résoudre ce problème, une campagne d’information sera lancée pour mieux faire connaître ces dispositifs. Le gouvernement prévoit aussi de simplifier les démarches en créant un système unique de signalement plus facile à utiliser.
Garantir la qualité des organismes de formation
Pour qu’un organisme soit reconnu par l’État ou puisse recevoir des financements publics, il doit garantir la qualité de ses méthodes pédagogiques et de ses outils d’apprentissage. Le plan de 2025 renforce donc le cadre de la certification Qualiopi, qui permet d’évaluer le sérieux et l’efficacité des organismes de formation. L’objectif est d’unifier les exigences de qualité à un niveau plus élevé, notamment pour les centres d’apprentissage, et de s’assurer que tous les apprenants bénéficient d’un accompagnement adapté à leur réussite.
Le référentiel Qualiopi va être amélioré afin de rendre les informations plus claires et plus fiables pour les jeunes. Trop souvent, certains organismes annoncent des débouchés exagérés ou présentent leur offre de façon trompeuse. Désormais, les centres de formation devront expliquer précisément leur mission, leur mode d’organisation entre la théorie et la pratique en entreprise, leur accompagnement dans la recherche de contrat, et les résultats qu’ils obtiennent réellement. Ils devront aussi prouver qu’ils forment les jeunes aux bons gestes professionnels pour travailler en sécurité, et respecter des règles déontologiques strictes sur l’affichage de leur reconnaissance par l’État.
Les audits de qualité vont également devenir plus rigoureux. Les contrôles auront lieu sur place, et le dirigeant du centre de formation devra être présent, afin d’éviter que tout soit géré par des cabinets externes sans lien réel avec la structure. Les auditeurs eux-mêmes devront être formés et certifiés officiellement. Leurs compétences seront vérifiées, et des règles de déontologie seront imposées pour éviter les conflits d’intérêts. De plus, France compétences, qui joue un rôle de régulateur dans le secteur, pourra superviser les organismes certificateurs, donner des recommandations et recevoir des signalements de manière confidentielle.
Enfin, l’obligation de détenir la certification Qualiopi va s’étendre. Actuellement, seuls les organismes qui bénéficient de fonds publics doivent être certifiés. Mais à l’avenir, tous ceux qui proposent des formations menant à une certification professionnelle devront l’obtenir, même s’ils ne touchent pas de financements publics. Cela inclut aussi les organismes financés par les fonds d’assurance formation destinés aux travailleurs non-salariés. Cette extension permettra de garantir un niveau de qualité équivalent pour tous, quels que soient les financements utilisés.
Tolérance zéro contre la fraude dans la formation professionnelle
Même si des progrès ont été faits ces dernières années, la fraude dans le secteur de la formation professionnelle reste une réalité préoccupante. Le gouvernement souhaite donc renforcer les moyens de contrôle, améliorer la coordination entre les acteurs publics et moderniser les règles pour rendre les sanctions plus rapides et plus efficaces. L’objectif est simple : empêcher les structures douteuses d’opérer et protéger les apprenants contre les pratiques abusives.
La loi du 30 juin 2025 a posé un cadre plus strict pour lutter contre toutes les fraudes aux aides publiques. Elle donne aux services de l’État le pouvoir de suspendre immédiatement la déclaration d’activité d’un organisme en cas de soupçon de fraude, sans devoir attendre une décision de justice. Les autorités pourront également refuser ou annuler l’autorisation d’exercer si l’organisme ne dispose pas de locaux ou a présenté des documents falsifiés. Si un dirigeant a déjà été sanctionné pour fraude, un délai de carence empêchera aussi la réouverture rapide sous un autre nom.
Pour rendre les contrôles plus efficaces, un décret prévoit plusieurs améliorations. Le système numérique « Mon Activité Formation » deviendra une plateforme sans papier permettant des échanges directs et sécurisés entre l’administration et les organismes. De plus, l’obligation de déposer un recours administratif avant de contester une sanction sera supprimée, afin d’accélérer les procédures. Des mesures complémentaires seront étudiées pour permettre l’anonymisation de certains contrôles et pour renforcer les sanctions administratives.
Autre avancée importante : les différents acteurs du secteur (État, financeurs, certificateurs) pourront désormais échanger leurs informations plus librement. Grâce à cette collaboration, un véritable système d’alerte partagé sera mis en place. Il permettra d’éviter les contrôles répétés sur les mêmes organismes et de mieux cibler les structures réellement à risque. Les programmes de contrôle seront ajustés en fonction des signalements reçus, ce qui garantira une meilleure efficacité des inspections.
Enfin, le gouvernement s’attaque aussi aux pratiques commerciales trompeuses, notamment dans l’enseignement supérieur privé, un secteur en forte croissance. Une enquête menée par la DGCCRF en 2021-2022 avait révélé des problèmes dans 21 % des établissements contrôlés. Certaines écoles vantaient des diplômes qu’elles n’étaient pas autorisées à délivrer, utilisaient abusivement les termes « licence » ou « master », ou affichaient de faux taux d’emploi et de faux avis positifs.
Face à la persistance de ces abus, une nouvelle enquête nationale sera lancée à l’été 2025. Elle ciblera en priorité les formations aux professions réglementées, comme celles dans les domaines de la santé ou du droit. Ces formations sont particulièrement sensibles car une fausse promesse peut empêcher un étudiant d’exercer le métier auquel il se prépare, faute de reconnaissance officielle du diplôme.