Durant une heure, Guillaume, co-fondateur de Lingueo et Pierre Monclos, DRH chez Unow ont échangé sur le CPF, son co-financement, et les évolutions à venir. Un webinaire très utile pour les responsables formation des entreprises en vue de la préparation de leur stratégie 2021.
Durant une heure en ligne, deux experts du domaine de la formation ont fait un bilan sur l’appli MonCompteFormation (CPF), sur la question du financement des formations par les entreprises, et sur les évolutions à venir. Un éclairage bienvenu pour accompagner les services RH et Formation dans la mise en place de leur stratégie de formation pour 2021.
Guillaume le Dieu de Ville – Cofondateur, Lingueo
Entrepreneur Edtech, il est le cofondateur de Lingueo, pionnier et leader européen des cours de langues en visioconférence. Présent et impliqué dans l’écosystème tech et dans l’enseignement supérieur, il dirige deux programmes de création et d’accélération de startups pour HEC, Polytechnique et 42.
Pierre Monclos – DRH & Expert en digital learning, Unow
Il a rejoint Unow en 2014 pour créer les premiers SPOC en France : des formations à distance tutorées et certifiantes, pour développer les compétences essentielles d’aujourd’hui.Il accompagne les entreprises dans leurs stratégies de digital learning et fait une veille approfondie sur les évolutions de la formation (pédagogies, technologies, réglementations, financements). Il anime également le blog rh42.co
Les principaux chiffres de l’appli CPF
Une date à retenir : le 21 novembre 2019 avec la mise en ligne de l’appli MonCompteFormation, en direction des particuliers. Tout était pensé pour que chacun gère individuellement son CPF.
Le résultat est positif après un an de vie de la plateforme, malgré quelques bugs :
- 13 millions de comptes créés,
- 320 000 formations,
- Le crédit formation disponible sur le CPF a été établi à une moyenne de 1280 euros,
- Le coût moyen d’une formation via le CPF s’établit à 2 119 euros,
- Un million de formation suivies ou engagées, soit une somme de 1 milliard d’euros.
Même si chiffres paraissent élever, le CPF reste peu mobilisé et donc tout l’enjeu de la Caisse des Dépots est de développer massivement le CPF.
Guillaume le Dieu de Ville souligne également l’intérêt de chacun à chercher s’il a un reliquat de DIF (droit individuel à la formation) qu’il pourra ajouter d’un clic au montant CPF. Cette démarche est individuelle et possible jusqu’à juin 2021.
La typologie des gens qui se forment a un peu évolué : si jusqu’en 2019, le dispositif était principalement utilisé par les cadres, il est plus ouvert avec des employés, techniciens, ouvriers qui viennent financer une formation.
Depuis septembre 2020, on a une nouvelle étape majeure avec l’ouverture du portail Entreprise du CPF. A elles de s’en saisir !
Dans les derniers chiffres publiés, la Caisse des Dépôts indique que « anglais » et « permis » sont les 2 termes les plus demandés sur le moteur de recherche de l’appli (langues 18 %). Pierre Monclos souligne que dans les intentions des entreprises évoquées dans le cadre d’un Baromètre lancé par Unow, les compétences transversales venaient au même niveau que les compétences techniques depuis le lancement de l’appli. Alors qu’avant cela, les compétences techniques étaient les plus plébiscitées.
A noter : les formations courtes se sont énormément multipliées dans l’application pour répondre aux besoins.
Du CPF autonome au CPF co-construit
Pierre Monclos souhaite ensuite partager les différents niveaux de stratégie possible pour intégrer le CPF dans votre stratégie globale de formation.
L’entreprise peut influer voire inciter à mobiliser le CPF du collaborateur via le dispositif appelé « CPF autonome ». Pour mémoire, le CPF autonome, c’est la capacité qu’un salarié a en tant que citoyen à mobiliser son crédit formation pour financer une formation. L’entreprise peut ainsi communiquer en interne, par exemple sur les heures de DIF non utilisées, la vertu du portail, sur le CPF globalement. Il est aussi possible d’accompagner les salariés pour créer leurs comptes (lors d’une réunion, avec un partage d’écran… ) et pour prendre en main l’appli. Toujours en laissant libre le salarié de choisir la formation qu’il veut !
Par ailleurs, une présélection des formations (après consultation du CSE) permet de :
- Les aider à trouver une formation,
- Identifier des formations de qualité,
- Choisir des domaines de formation pertinents,
- Choisir des formations avec des tarifs négociés.
Pour une politique de CPF co-construite, Pierre Monclos met également en avant la possibilité de proposer un suivi en tout ou partie sur le temps de travail. Pour que cela fonctionne bien, il faut mettre en place un process de demande (nombre d’heures possibles, à qui faire la demande, quelle démarche suivre). Cela permettra de faire une réponse rapide par le responsable des formations en interne.
Guillaume le Dieu de Ville précise qu’on passe d’une politique construit avec les besoins remontés par les managers à une politique où chacun va contribuer. Et pour ne pas être débordés, le process est clé pour s’en sortir !
Par ailleurs, il existe des abondements au CPF possibles par l’entreprise. L’entreprise doit s’interroger sur le co-financement et le périmètre dans lequel elle souhaite en mettre en place.
Guillaume le Dieu de Ville précise trois termes à bien comprendre :
- L’alimentation : c’est défini par décret (500 euros / an ou 800 euros suivant la typologie de salariés),
- La dotation : elle est faite en fonction de la politique d’entreprise, d’accords signés avec les partenaires sociaux, avec un versement sur un compte ou plusieurs comptes CPF,
- L’abondement : il doit être lié à une formation où il y a un « reste à financer ».
Techniquement, on parle de « dotations » pour ces 3 termes sur la plateforme MonCompteFormation. A noter : il existe d’autres dotations en cas de licenciement, etc.
Il existe aussi des abondements dits de branche professionnelle et de Région. Guillaume le Dieu de Ville indique qu’on peut alors imaginer des mappings à partir d’un côté de typologie de salariés et de qualification, et de l’autre des formations. Une expérimentation est menée en ce sens avec la Région Pays de Loire : des règles d’attribution ont été établies pour des formations que la Région veut mettre en avant pour des publics spécifiques.
L’Etat peut aussi de cette manière venir mettre en place des politiques d’abondement. Dans le plan de relance, on a 25 millions annoncés pour des formations des métiers stratégiques de demain (sans précision pour le moment sur les dits métiers).
Pierre Monclos rappelle combien il est essentiel de connaître tous ces abondements pour adapter ensuite votre politique de formation afin de faire les meilleurs choix demain.
De même, un accord d’entreprise présente plusieurs avantages. Il est développé aujourd’hui plutôt dans des grandes entreprises :
- Passer en direct avec la Caisse des Dépôts,
- Légitimer la mobilisation du CPF avec le soutien des représentants du personnel,
- Symboliser l’importance de la politique CPF.
Attention toutefois à la rigidité d’un accord qui demanderait un avenant si vous voulez faire évoluer votre offre rapidement !
Les évolutions de l’appli CPF
- Avis utilisateurs : relais qui va permettre d’avoir le retour des utilisateurs de formation via une note sur 5 étoiles, et le nombre de fois où la formation a été suivie. Ce sera ainsi un indicateur autant pour les entreprises que pour les salariés
- Inscriptions massives : fichier tableur jusqu’à 1 000 personnes.
- Codes de réduction : dans les prochains mois, les organismes de formation pourront générer des bons de réduction applicables sur des formations et aussi de les faire appliquer directement sur les formations concernées via la Caisse des Dépôts.
- Amélioration du moteur de recherche : en tant qu’entreprise, à vous de faire de la curation d’offres pour accompagner vos salariés dans leurs recherches,
- Fiabilisation de l’offre : un énorme travail sur la fiabilisation des formations est en cours. Attention aux arnaques développées depuis plusieurs mois !
Questions / réponses avec les internautes durant le webinaire
Question – Quelle est la bonne politique pour financer la formation de ses collaborateurs ?
Pierre : il faut fixer sa politique tarifaire, solution la plus fréquente et la plus simple. Par exemple, chez Unow, c’est 200 euros par salarié. Certaines entreprises ont choisi la politique de ratio : 20 % de l’investissement CPF des collaborateurs (avec un plafond de 360 euros/an par exemple). Ou sinon il est possible d’envisager le cas par cas, pour prendre la température des besoins réels avec la limite que, dès 15 personnes, c’est le début d’une jungle administrative !
Guillaume rappelle que dès qu’il a abondement ou formation sur le temps de travail, l’entreprise est impliquée.
Question – dotation difficile à envisager quand on n’a pas de visibilité de ce qu’en fera le collaborateur. Que faire ?
Pierre met en avant les expériences d’entreprises qui n’ont pas envie d’aller vers un accord écrit du type « si je fais une dotation, tu devras faire… ». Chez Unow, il existe une politique de l’abondement pour l’ensemble de l’entreprise. Quand un salarié s’inscrit sur son compte CPF, il est identifié pouvant bénéficier de l’abondement (300 euros) et cela s’ajoute alors automatiquement à son crédit formation. On les refacture alors à l’organisme de formation.
Guillaume complète l’échange. Démarches internes et possibilité de demander un certificat de formation permettent de border d’éventuelles fraudes. Une internaute suggère, qu’au moment de la demande de formation, la solution serait une clause de dédit formation. La discussion est ouverte avec la Caisse des Dépôts.
Si la formation n’est pas suivie en cas de force majeure, le collaborateur récupère toute la somme CPF mais l’abondement reste bloqué jusqu’à une prochaine formation pour l’entreprise.
Question – les formations co-financées dans le cadre du CPF ne peuvent pas être comptabilisées dans le bilan à 6 ans des entretiens professionnels ?
Pour Guillaume, s’il y a cofinancement, cela devrait rejoindre les formations comptabilisées, mais aujourd’hui on a différents sons de cloche donc à voir auprès de la Caisse des Dépôts prochainement. En complément, Pierre partage son expérience : l’obligation de formation tous les 6 ans n’est pas une obligation de financement selon les textes juridiques, juste le temps de travail pourrait suffire au titre de l’obligation.
Question – Quelle est la durée moyenne entre la dotation volontaire réalisée par l’entreprise et la visibilité de cette dotation par le salarié pour valider sa formation ?
Guillaume répond : c’est le temps d’un virement, en gros 48 h et 5 jours maximum !
Question – A quelles informations du suivi de la formation l’entreprise peut-elle avoir accès en cas d’abondement ? peut-elle avoir un accès à une plateforme de suivi de l’OF ?
A aucune… C’est le process qui est important ! Dès que vous connaissez les dates de formation, vous demanderez au salarié son certificat de fin de formation. Mais vous n’aurez pas la possibilité d’un suivi.
Responsables formation, RH, entrepreneur, comment envisagez-vous la formation de vos salariés en 2021 ? Dites-le nous en commentaire !
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