Nous sommes allés à la rencontre de Laurent Durain, Directeur de la Formation professionnelle à la Caisse des Dépôts, pour mieux comprendre le fonctionnement des ces abondements, l’objectif fixé par le gouvernement et les prochaines étapes.
Malgré la crise sanitaire, le nombre d’inscriptions aux formations CPF n’a pas faibli, boosté en parti par les offres en ligne, moncompteformation a également bénéficié de l’arrivée des abondements Pôle Emploi.
Hier, c’était au tour des employeurs d’accéder à leur espace, ils peuvent maintenant abonder le compte de leurs salariés.
Les demandeurs d’emploi peuvent demander un abondement à Pôle Emploi via leur CPF.
L’accrochage des deux systèmes d’information s’est-il bien déroulé ?
L’accrochage des deux systèmes d’information s’est déroulé sans difficulté, et nous avons reçu des demandes d’abondement dès le premier jour. Les équipes de la Caisse des Dépôts et de Pôle Emploi travaillent main dans la main depuis le mois de janvier pour faire en sorte que les abondements pour les demandeurs d’emploi soient une réussite, que ce soit sur le plan technique avec les équipes digitales mais aussi sur le plan métier.
Trois conventions de partenariat ont été signées, la première qui permet à Pôle Emploi de déléguer les crédits associés aux autorisations d’abondements, la deuxième qui est la convention technique qui permet de sécuriser les flux d’information, et la troisième qui permet un travail très étroit entre Pôle Emploi et la Caisse des Dépôts autour des aspects qualité et contrôle.
La réactivité propre au nouveau CPF est-elle la même dans cette relation tripartite ?
Toute demande d’abondement d’un demandeur d’emploi est instruite directement par son conseiller Pôle Emploi, l’analyse est individualisée et s’effectue notamment au regard de la situation personnelle du demandeur et de la nature de la formation.
Pour être plus précis, l’ensemble des demandes enregistrées par moncompteformation converge vers un routeur de Pôle Emploi qui transmet la demande directement dans le bureau virtuel du conseiller. Ce dernier fait l’instruction du dossier et formalise la décision selon le processus en vigueur à Pôle Emploi. Les demandes sont instruites en moins de 10 jours et 60% sont favorables !
Monsieur Laurent Durain, depuis le 3 septembre, les entreprises sont capables d’abonder le compte de collaborateurs, pouvez-vous nous en dire plus ?
Le portail à destination des entreprises a été conçu avec deux groupes témoins, un premier qui a réuni de grandes entreprises ou grands groupes afin de nous assurer que les services numériques que nous développions pouvaient répondre aux organisations des structures de taille importante, avec des fonctions RH structurées, et un second composé de petites entreprises et d’experts comptables qui nous a permis de confronter l’ergonomie des écrans, la fluidité des processus et son accessibilité au plus grand nombre.
Nous avons également noué un partenariat avec le GIP MDS, qui gère les données sociales de la déclaration sociale nominative et le portail net entreprise, qui nous permet d’habiliter plus de 2 millions d’entreprises au portail.
Nous avons également déployé dès juillet un portail d’information à destination des entreprises qui leur permet de prendre en main l’outil et de disposer d’information et d’un guide d’utilisation sur le CPF.
Le portail a été déployé aujourd’hui sans difficulté.
Quelles sont les attentes/objectifs de cette ouverture ?
Si le premier volet de mise en œuvre de l’application moncompteformation a été déployé auprès du grand public le 21 novembre avec un certain succès, il faut noter que nous constatons une augmentation des inscriptions (5 000 par jour), il y manquait la dimension abondement qui complète et équilibre le dispositif. C’est ce qui est en train d’être déployé cette année.
Le premier volet a été constitué des demandeurs d’emploi qui représentent une cible prioritaire pendant la phase de confinement. Avec la mise en place du plan de relance, l’application moncompteformation se tourne aujourd’hui vers le service aux entreprises et aux salariés.
L’objectif du portail entreprise est de permettre à chaque entreprise d’intégrer le compte personnel de formation dans sa politique de formation et de compétitivité, basée sur les compétences et le fait de pouvoir nourrir le dialogue avec ses salariés. Pour appuyer ce dialogue, nous avons visé la simplicité et la fluidité pour les entreprises, en quelques clics, elles ont la possibilité de verser de l’argent sur le compte personnel de leurs salariés.
Une entreprise se connecte, saisit le numéro de sécurité sociale du ou des salarié(e)s pour lesquels elle souhaite faire des versements, saisit le montant et effectue le virement vers la Caisse des Dépôts. A réception des fonds, le compte du ou des salarié(e)s est crédité.
Monsieur Laurent Durain, quelles sont selon vous les prochaines évolutions ?
Comme pour les organismes de formation, après une première phase d’observation du service, nous mobiliserons les entreprises pour récolter leur retour d’expérience sur le produit et l’améliorer en continu.
Nous réfléchissons déjà en opportunité à diversifier les modalités de versement, élargir la palette de service (qui est déjà très fournie) et favoriser également le lien entre l’entreprise et les organismes de formation.
A moyen terme, les entreprises utiliseront-elles d’autres moyens pour former ?
Les entreprises sont un acteur essentiel de la réussite du CPF. La mise en œuvre des abondements est une étape très attendue. La mise en œuvre du plan de relance, la capacité d’innovation des entreprises et leur retour nourriront la feuille de route de l’application moncompteformation pour permettre son intégration au cœur, et en complément d’autres dispositifs comme l’alternance par exemple, de la stratégie de compétences et de compétitivité.
Dans quelques mois sont prévus également les abondements des régions et des branches.
Pouvez-vous nous en dire plus ?
Nous travaillons déjà à la prochaine version, qui devrait arriver avant la fin de l’année, avec les grands financeurs, les régions, les branches, l’AGEFIPH et l’Etat. L’objectif est de pouvoir proposer une offre de service abondement qui ne soit pas basée uniquement sur le versement d’un montant sur le compte mais qui intègre les avancées de la gestion du “big data” et de “l’intelligence artificielle” pour sélectionner des sous-catégories de population et des sous-catégories de certification, et d’y appliquer des règles de financement spécifique, en temps réel. Nous avons déjà signé une première convention avec la région Pays de la Loire et travaillons avec les autres régions et quelques premières branches pour démarrer tout début janvier 2021.
Concrètement et pour illustrer le propos, il sera possible de déterminer des règles, intégrées directement dans le système, de gestion de type : pour tous les salariés de tel secteur d’activité dans tel territoire, dès lors qu’ils souhaitent se former sur une certification A ou B, la région attribue automatiquement une aide de X euros en plus du solde du compte. Ce moteur pourrait également être utilisé par les entreprises qui souhaiteraient par exemple contribuer au financement de telle typologie de formation pour telle typologie de salarié.
Comment ça marche côté usager ? Quand la personne recherchera une formation, elle visualisera automatiquement les formations qui font l’objet d’un cofinancement et elle n’aura aucune démarche à faire pour le mobiliser, un simple clic et l’inscription est lancée. C’est d’ailleurs ce système qui sera utilisé pour la mise en œuvre de l’abondement de l’Etat sur les formations au numérique dans le cadre du plan de relance.
Si je comprends bien Mr Laurent Durain, le CPF va devenir la colonne vertébrale de la formation ?
Le CPF est devenu aujourd’hui un outil grand public indispensable sur le champ de la formation professionnelle, qui favorise l’appropriation de la formation par chaque Français au service de ses compétences. Avec la mise en œuvre des abondements, son action s’élargit pour y intégrer à la fois une partie des politiques d’intervention des régions et des branches, mais aussi un des outils de GPEC des entreprises.
Selon Laurent Durain, l’application moncompteformation, dont le ministère du Travail a confié la gestion à la Caisse des Dépôts, a donc su s’intégrer en complémentarité des autres dispositifs de financement de la formation professionnelle, que ce soit l’alternance, les formations du PIC, les plans de formation des régions et les plans de formation des entreprises. Ce n’est pas tant la colonne vertébrale de la formation qu’un outil au service des synergies qui se créent entre la liberté de choisir son avenir professionnel pour les Français et le besoin en compétences et en compétitivité des entreprises.
Laisser un commentaire