Résumé : L’Acte II de la réforme de la certification professionnelle vise à renforcer la qualité, la transparence et l’impact des certifications inscrites aux répertoires nationaux en France. Le décret n° 2025-500 du 6 juin 2025, publié au Journal officiel le 8 juin 2025, revoit en profondeur les règles d’enregistrement au RNCP (Répertoire national des certifications professionnelles) et au Répertoire spécifique. Il introduit de nouveaux critères exigeants pour inscrire ou renouveler une certification, instaure des cas de refus immédiat de dossiers, encadre plus strictement les habilitations de centres de formation partenaires, et renforce les contrôles exercés par France compétences, avec un éventail graduel de sanctions en cas de manquement.
La plupart de ces dispositions entreront en vigueur dès le 1er octobre 2025, marquant une étape majeure de cette réforme post-loi « Avenir professionnel » de 2018.
Les organismes certificateurs (ministères, branches, OF, etc.) déjà titulaires de certifications au RNCP/RS devront s’adapter rapidement à ces nouvelles obligations, avec l’appui d’un vadémécum et de webinaires annoncés par les autorités.
Texte officiel du décret et analyses
Texte officiel : Le décret n° 2025-500 du 6 juin 2025, disponible sur Légifrance, modifie les critères d’enregistrement des certifications professionnelles au RNCP et des certifications/habilitations au Répertoire spécifique. Il renforce les pouvoirs de contrôle de France compétences et définit les conditions de validité des habilitations accordées par un ministère ou un certificateur à des organismes partenaires.
Ce texte réglementaire, pris par le Ministère du Travail, a été publié au JO n°133 du 8 juin 2025 et codifie notamment de nouveaux articles dans le Code du travail (articles R.6113-8-1 et suivants, R.6113-16 et suivants modifiés) relatifs à la certification professionnelle.
« Le texte modifie les critères d’enregistrement des certifications professionnelles […] dans le RNCP et le Répertoire spécifique. Il renforce, en outre, les pouvoirs de contrôle de France compétences ainsi que les sanctions qu’il peut prononcer à l’encontre des organismes certificateurs. Il précise également la forme juridique et le contenu des habilitations délivrées […] à des organismes pour préparer à l’acquisition d’une certification […] ou pour assurer l’évaluation des candidats inscrits aux sessions d’examen. »
Analyses officielles : Une présentation du décret a été faite le 24 juin 2025 par la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (Ministère du Travail) devant la Commission de la certification professionnelle.
France compétences a annoncé qu’un nouveau vadémécum de la certification professionnelle sera publié pour remplacer le guide RNCP actuel, afin d’expliciter ces évolutions.
Par ailleurs, la Commission organisera à partir de septembre 2025 un cycle de webinaires d’accompagnement pour les certificateurs, et la base documentaire officielle sera mise à jour en parallèle. Ces mesures visent à aider les acteurs à s’approprier le nouveau cadre.
Nouvelles obligations pour les organismes certificateurs
Le décret introduit de nouvelles exigences concrètes pour les ministères, branches, organismes de formation et autres entités souhaitant inscrire ou maintenir des certifications au RNCP/RS.

Un organisme certificateur devra désormais adopter une posture de pilote qualité de sa certification sur la durée. Par exemple, mettre en place des enquêtes systématiques auprès des diplômés pour suivre l’emploi (outil de suivi d’insertion professionnelle), formaliser un système documentaire pour tracer les éventuelles non-conformités et actions correctives, et anticiper dès la conception du dossier d’enregistrement tous les nouveaux critères (transitions, accessibilité, etc.). Des outils spécialisés existent pour aider à cette mise en conformité (logiciels de gestion de certifications, plateformes d’“accrochage” de données, etc.).
Les certificateurs sont encouragés à auditer régulièrement leurs partenaires habilités, à sensibiliser leurs formateurs aux exigences du référentiel, et à participer aux webinaires d’information à venir. Certains acteurs ont d’ores et déjà amorcé ces ajustements en 2025, illustrant les bonnes pratiques (voir plus loin Cas concrets). En savoir plus sur les Nouvelles obligations et ce que les Certificateurs doivent anticiper.
Encadrement des habilitations : nouvelles obligations des partenaires
Le réseau de partenaires habilités (organismes de formation ou d’évaluation tiers) fait l’objet d’un cadre réglementaire inédit, introduit par ce décret (articles R.6113-16-1 à R.6113-16-6 nouveaux). Qu’est-ce qui change ?
Obligations des organismes habilités à former :
Un organisme tiers habilité par un certificateur pour la préparation à une certification doit respecter strictement le cadre défini par le référentiel et le certificateur. Il est tenu de :
- Utiliser l’intitulé exact de la certification professionnelle (ou du bloc de compétences concerné) dans toute communication, y compris sur MonCompteFormation et les documents aux financeurs. Les intitulés “marketing” approximatifs ne sont plus acceptés.
- Dispenser l’intégralité des compétences prévues par le référentiel, y compris les compétences transversales, dans ses actions de formation.
- Respecter les durées minimales et maximales fixées pour la formation, les stages en entreprise obligatoires, etc., par le certificateur, la réglementation ou des normes (le cas échéant).
- Assurer les éventuelles exigences de présentiel définies par le certificateur (ex: un volume horaire en salle obligatoire).
- Ne pas dépasser le nombre maximal de stagiaires par formateur fixé par le référentiel ou le certificateur, s’il en existe un.
Obligations des organismes habilités à évaluer :
Un organisme tiers habilité pour l’évaluation (organisation des examens) doit :
- Organiser des sessions d’examen conformes en tout point au référentiel d’évaluation de la certification/habilitation concernée (épreuves, critères d’évaluation, conditions matérielles, etc.).
- Si cet organisme assure aussi la formation des candidats (habilitation “formation + évaluation”), il a l’obligation d’inscrire ses propres stagiaires à au moins une session d’examen qu’il organise lui-même. En d’autres termes, un centre qui forme doit offrir à ses apprenants la possibilité de passer l’examen chez lui, évitant ainsi les dérives consistant à former sans faire passer la certification.
Formalisme des habilitations (dès 1er octobre 2025) :
Toute nouvelle habilitation délivrée à partir du 1er octobre 2025 devra respecter un formalisme spécifique :
- Si l’habilitation est accordée par un ministère certificateur : une décision expresse du ministère (arrêté individuel) ou le silence gardé pendant 4 mois sur la demande vaudra acceptation tacite
- Si l’habilitation est accordée par un organisme certificateur privé/public : une convention écrite doit être conclue entre le certificateur et le partenaire.
Dans les deux cas, à défaut de textes spécifiques propres à une filière, l’habilitation doit préciser au minimum : son objet exact, les certifications ou blocs concernés, sa durée de validité, les éventuelles contreparties financières demandées par le certificateur au partenaire, les conditions de sous-traitance admissibles (notamment pour les actions éligibles CPF), ainsi que les moyens pédagogiques, techniques et d’encadrement que le partenaire s’engage à mobiliser. - Dans le cas particulier d’une habilitation liant un établissement d’enseignement et un CFA par délégation (pour l’apprentissage), la convention de délégation devra en outre préciser les modalités de gestion administrative des apprentis entre les deux entités.
- Chaque ministère certificateur devra prendre un arrêté précisant comment les organismes peuvent solliciter une habilitation et comment elle est délivrée.
Suivi et déclarations à France compétences :
Les certificateurs devront tenir France compétences informée dans un délai de 2 mois de toute nouvelle habilitation ou modification affectant une habilitation (contre 3 mois auparavant). La liste complète des organismes habilités doit donc être à jour en permanence. Cette obligation formalise des pratiques de transparence pour permettre à France compétences de connaître précisément le réseau de diffusion de chaque certification.
Sanctions en cas de manquement d’un partenaire :
Si un organisme habilité ne respecte pas ses obligations, le certificateur (ou le ministère) peut réagir. Le décret prévoit qu’en cas de manquement avéré du partenaire : l’habilitation peut être suspendue en urgence à titre conservatoire. Ensuite, après procédure contradictoire, le ministère peut abroger sa décision d’habilitation ou le certificateur peut résilier la convention d’habilitation avec effet immédiat. Autrement dit, un partenaire peu rigoureux pourra se voir retirer son habilitation, ce qui entraînera son déréférencement de la certification et donc de la plateforme CPF s’il y était présent.
En somme, chaque organisme partenaire doit désormais se comporter en “extension” responsable du certificateur. Ces règles officialisent ce qui relevait parfois de la simple charte qualité : utilisation du bon intitulé, programme strictement conforme, suivi des prérequis imposés, etc.
Les certificateurs devront, de leur côté, formaliser leurs exigences par écrit et contrôler activement leur réseau (échanges de données, audits éventuels). Cette professionnalisation du système d’habilitation vise à assurer une homogénéité dans la délivrance d’une même certification, quel que soit le lieu ou l’entité qui la met en œuvre.
Impacts opérationnels pour les certificateurs
Le décret 2025-500 change la donne pour tous les organismes déjà enregistrés au RNCP ou au Répertoire spécifique. Entre contrôles renforcés, indicateurs à suivre et sanctions possibles, chaque certificateur doit anticiper ses nouvelles obligations dès maintenant.
👉 Découvrir en détail les impacts opérationnels et les délais à respecter
Réactions des acteurs du secteur
L’accueil de la réforme est globalement positif quant à ses objectifs (qualité, transparence, adéquation emploi). Les réserves portent surtout sur la capacité opérationnelle de tous les certificateurs à suivre le rythme imposé. :
Fédérations et syndicats professionnels : Les Acteurs de la Compétence, ainsi que le Synofdes (organismes de formation à vocation sociale) ont été consultés en amont. Ils soutiennent globalement l’objectif de qualité, mais restent vigilants sur la mise en œuvre pratique. Les Acteurs de la Compétence avaient d’ailleurs anticipé certaines mesures en adoptant dès 2022 une Charte de déontologie pour lutter contre les abus sur le CPF (démarchage agressif, fraude). Ils appellent à ce que France compétences exerce son pouvoir de régulation de manière équilibrée, sans pénaliser l’innovation ou la diversité des offres. Ils ont proposé l’élaboration d’une charte d’engagement des certificateurs pour formaliser les bonnes pratiques conformément à l’Acte II (information transparente des candidats, respect du code de conduite, etc.).
France compétences (autorité de régulation) : Via son communiqué du 25 juin 2025, France compétences salue ce décret qui « fixe de nouvelles conditions d’enregistrement […] renforce les contrôles de France compétences et définit les conditions de validité de l’habilitation »
L’organisme insiste sur la cohérence de ces mesures avec sa mission de régulation, et sur la volonté de professionnalisation accrue du secteur. La Commission de certification s’est immédiatement mobilisée pour accompagner la mise en œuvre (travail sur le vadémécum et planning de réunions supplémentaires). On note que France compétences, dès mai 2025, avait anticipé ces évolutions dans ses échanges avec les certificateurs, évoquant un resserrement des critères de qualité.
Ministère du Travail : Officiellement, le Ministère présente ce décret comme un approfondissement de la réforme de 2018, visant à « renforcer l’efficacité et la lisibilité » des certifications.
Il souligne que les dispositions découlent de retours d’expérience de ces dernières années (multiplication de certifications redondantes, fraudes CPF, etc.) et qu’il s’agit de sécuriser les financements publics (CPF, apprentissage) investis dans les formations certifiantes. Le Ministère a également indiqué que les fiches RNCP sur le site officiel seront adaptées pour intégrer les nouveaux indicateurs (ex. taux d’insertion affiché lorsqu’il est disponible, etc.).
Certification pro : 5 évolutions du secteur à bien comprendre
1️⃣ Des certificateurs qui sécurisent leurs partenariats
Pour être prêts dès octobre 2025, de nombreux certificateurs révisent en profondeur leurs conventions d’habilitation avec les organismes partenaires. L’objectif : clarifier les responsabilités de chacun, prévenir les litiges et répondre aux futures vérifications plus exigeantes.
2️⃣ Des catalogues recentrés sur l’essentiel
Face au seuil d’environ 60 % d’insertion attendu pour le maintien au RNCP, plusieurs acteurs choisissent de réduire ou fusionner certaines certifications jugées redondantes ou insuffisamment porteuses. France compétences encourage aussi cette logique de rationalisation pour rendre l’offre plus lisible.
3️⃣ Un suivi plus précis de l’insertion des diplômés
Ministères, grandes écoles et certificateurs privés renforcent leurs enquêtes de suivi pour prouver l’impact réel de leurs certifications sur l’emploi. Sans données solides, il devient plus risqué de prétendre à un renouvellement.
4️⃣ Un contrôle renforcé par France compétences
Côté pilotage, France compétences met en place un suivi plus étroit : contrôles documentaires ou sur site plus fréquents, vérification des partenariats, refus de dossiers pour doublons… L’enjeu : garantir que chaque certification corresponde à un besoin concret du marché du travail.
5️⃣ Un rapprochement avec les standards internationaux
Cette évolution réglementaire s’inscrit dans une dynamique plus large : de nombreux pays — Royaume-Uni, pays nordiques, Union européenne — exigent déjà un suivi régulier des résultats et une meilleure intégration des transitions écologique et numérique dans les référentiels. La France conforte ainsi sa position en matière de qualité et de transparence.
Agenda : mises en œuvre et prochaines échéances
Voici les dates clés et étapes à retenir pour la mise en œuvre de cette réforme :
À partir du 1er octobre 2025, tout l’écosystème de la certification professionnelle en France passera à un cadre plus exigeant, pensé pour garantir une meilleure qualité et un vrai impact sur l’insertion. Cette évolution se déploie étape par étape sur plusieurs mois : chaque organisme certificateur a encore quelques mois pour se mettre en ordre de marche, revoir ses pratiques et anticiper les nouvelles vérifications.
Heureusement, chacun peut s’appuyer sur un accompagnement renforcé et sur des ressources claires pour s’adapter sans précipitation. Pour suivre toutes les échéances et jalons à venir, pensez à rester informé et à planifier chaque action dans les temps.
Ce qui change / Ce qui reste (tableau comparatif)
Pour mieux comprendre l’impact du décret 2025-500, voici un tableau récapitulatif qui met en regard ce qui change et ce qui reste inchangé pour la certification professionnelle.
Cet outil pratique vous permet d’identifier en un coup d’œil les nouvelles obligations et de vérifier ce qui continue de s’appliquer.