Interview d’Hervé Jouanneau, Adjoint à la Directrice du développement des compétences dans les territoires de Pôle emploi

Suite à la publication des statistiques trimestrielles de Pôle Emploi, nous avons interrogé Hervé Jouanneau, Adjoint à la Directrice du développement des compétences dans les territoires de Pôle emploi sur les entrées en formation par les demandeurs d’emploi.

La part des formations financées, totalement ou partiellement, par Pôle emploi chute au premier trimestre 2021 de 10 points par rapport au premier trimestre 2020. Comment l’expliquez-vous ?

Cette baisse de la part des formations financées par Pôle emploi est due avant tout à la forte hausse globale des entrées portée par le CPF autonome. Ce dernier croit de près de 186 % sur la même période entre 2021 et 2020. La hausse globale est quant à elle de plus de 83 % et Pôle emploi affiche une hausse supérieure à 65 %.

La crise sanitaire intervenue à la mi-mars 2020 a amplifié cet écart puisque très peu d’entrées avaient eu lieu entre le 10 mars et la fin mars 2020.  

Hors CPF autonome, la part des formations financées par Pôle emploi progresse : de 54 % à fin mars 2020 à 60 % à fin mars 2021.

Le CPF semble le dispositif en pleine croissance en période de chômage avec 41 % des entrées en formation mobilisant le CPF autonome. Comment accompagnez-vous les demandeurs et demandeuses d’emploi pour utiliser au mieux leur CPF ?

Le conseiller met son expertise au service du demandeur d’emploi en favorisant l’acquisition, le maintien ou le développement de compétences du demandeur d’emploi lui permettant de s’orienter à court terme mais également d’être autonome tout au long de sa vie professionnelle.

Les conseillers accompagnent les demandeurs d’emploi dans l’identification des compétences à acquérir ainsi qu’en les aidant à identifier les formations pouvant répondre à ses besoins. Le choix de l’organisme de formation, en cas de pluralité de choix, appartient au demandeur d’emploi.

Pôle Emploi peut abonder les CPF en fonction du projet de chaque individu. Pouvez-vous nous faire un point sur les abondements déjà réalisés ?

Pôle emploi peut abonder les CPF des demandeurs d’emploi depuis le 8 juillet 2020. Près de 51 000 abondements CPF ont été validés entre juillet 2020 et fin juin 2021.

Les conseillers Pôle emploi accompagnent les demandeurs d’emploi dans le cadre du Conseil en Evolution Professionnelle. C’est dans le cadre du conseil en formation/développement de compétences que l’abondement CPF peut se mettre en œuvre, lors de l’étude du projet du demandeur d’emploi.

Si l’on compare la durée moyenne prévisionnelle des formations par type de formation, on constate un effondrement du nombre d’heures passant de 353 h au 1er trimestre 2020 à 275 h au 1er trimestre 2021. Est-ce dû à la mobilisation plus grande du CPF (et donc de formations courtes) ou à d’autres facteurs ?

Ce chiffre est dû au volume de formation CPF autonome. Hors CPF autonome, la baisse est très limitée.

On passe de 462 h en 2020 à 459 h à fin mars 2021. En effet, la durée moyenne des formations financées par le CPFA et son poids grandissant dans le total des formations 2021 fait inévitablement baisser la durée moyenne des formations.

Trois champs de formations concentrent plus d’un tiers des entrées en formations. Comment pouvez-vous sensibiliser les personnes inscrites à Pôle Emploi à ouvrir le champ des possibles, et notamment vers les métiers en tension ?

Depuis un an, Pôle emploi est particulièrement mobilisé pour accompagner les recrutements dans les secteurs en tension et « ouvrir le champs des possibles » en matière de formation.

Nous organisons des opérations de découverte des métiers et de promotion de formation au sein mêmes des agences. Entre septembre 2020 et juillet 2021, ce sont ainsi près de 14 000 événements de ce type qui ont été organisés partout en France. Nous effectuons parallèlement de nombreuses campagnes de promotion des secteurs en tension, souvent en partenariat avec les fédérations professionnelles. Ces campagnes se matérialisent par des conseils et vidéos métiers sur nos sites internet et via nos réseaux sociaux. En ce moment-même, nous promouvons les métiers du transport et de la logistique. D’autres campagnes sont également prévues, pour promouvoir les métiers de l’industrie ou encore du numérique.

Surtout, nous utilisons les leviers très efficaces que sont les immersions professionnelles. Ils permettent à la fois aux demandeurs de découvrir un métier, mais également à l’employeur de donner envie de le rejoindre. 146 000 immersions, d’une semaine en moyenne, ont ainsi été réalisées en 2020. Elles ont débouché pour 72 % d’entre elles sur un emploi dans les 12 mois.

Pour compléter le tout, depuis la crise sanitaire, nous montons avec les professionnels des secteurs en tension des formations courtes permettant aux demandeurs d’emploi d’être plus rapidement opérationnels sur le terrain. Ces formations sont ou ont été jusqu’ici plus particulièrement dédiées aux secteurs de la santé et à celui de la restauration. Nous souhaitons bientôt pouvoir élargir le périmètre.

A la lecture de la publication sur les statistiques trimestrielles, nous nous sommes demandés si le CPF venait en complément ou se substituait aux autres dispositifs – déjà existants – de retour en formation proposés par les différents financeurs. Quelle est votre analyse sur ce point ?

C’est totalement complémentaire. Le CPF permet aujourd’hui de faire plus de formations, plus d’entrées. Les financeurs (Pôle Emploi, Conseil régionaux et Opco qui sont les 3 principaux) ont maintenu et même élevé leur niveau financier d’intervention sur la formation.