Elaborer une stratégie nationale de compétences

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Faire face aux mutations du monde du travail exige de faire évoluer la structuration du système actuel de formation, en clarifiant ou en redéfinissant le rôle de chacun des acteurs (entreprises, branches, pouvoirs publics) en fonction des objectifs poursuivis.

En France, le diplôme initial reste un élément déterminant de la qualification des individus et de leur insertion professionnelle. Pourtant, ce modèle dit “de la qualification” est de plus en plus remis en cause par la rapidité des changements technologiques et de l’évolution des besoins des entreprises.

Décrocher un diplôme reste au coeur des préoccupations, mais les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances. En 1982, 56 % de la population active était sans diplôme, contre 20 % en 2013. Néanmoins, encore près de 100 000 jeunes sont sortis en 2016 du système de formation initiale sans qualification et 10 % des 16-29 ans ne maîtrisent pas les compétences de base.

Par ailleurs, d’après l’enquête PIAAC, presque un tiers des adultes français (16-65 ans), soit 5 points de plus que la moyenne de l’OCDE, disposent de faibles compétences de base (informations écrites et/ou chiffrées).

Comment les pouvoirs publics, les partenaires sociaux, les entreprises et les individus eux-mêmes peuvent-ils contribuer à faire évoluer le système de formation pour que chacun accède à l’emploi et maintienne ensuite son employabilité tout au long de la vie ? A la clé, une société plus performante et mieux armée pour faire face aux mutations économiques et sociales de demain.

Des difficultés d’insertion à tous les niveaux

Au niveau de la formation initiale (relevant de la responsabilité de l’Etat en France), 30 % des élèves scolarisés au lycée le sont dans des filières professionnelles. Des efforts ont aussi été entrepris pour intégrer l’apprentissage ou les stages professionnels à tous les niveaux d’études. Le nombre d’apprentis est en forte augmentation entre 2003 et 2007. Tiré par l’apprentissage dans le supérieur, il plafonne néanmoins depuis quelques années autour de 400 000.

Du côté de la formation continue, dont les partenaires sociaux sont des acteurs centraux, l’offre au niveau des branches professionnelles s’est enrichie avec la multiplication des certificats de qualification professionnelle (CQP) ou interprofessionnelle (CQPI), permettant la reconnaissance de compétences attachées à un type d’activité donné.

Pourtant, malgré ces efforts pour adapter la formation initiale et continue aux besoins des entreprises, la situation du marché du travail demeure insatisfaisante :

  • d’une part l’insertion dans l’emploi des jeunes et des chômeurs reste problématique, surtout pour les moins qualifiés ;
  • d’autre part, nombre d’entreprises éprouvent des difficultés à trouver les compétences dont elles ont besoin. 

Les compétences : au coeur des discours mais pas des pratiques

Du côté des politiques publiques et des partenaires sociaux, de nombreuses lois ou accords nationaux visent, depuis plus de 15 ans, à faire évoluer le système de formation vers une logique de compétences. La logique de compétences transparaît nettement au travers de la volonté de structurer les enseignements et les formations de façon modulaire, mais cela est loin d’être systématique.

La loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle a ainsi instauré un droit à la formation attaché à l’individu et la modularisation des formations. Elle a également créé des instances de coordination au niveau national et régional (Copanef/Coparef, Cnefop/Crefop). Sa limite ? Le rôle respectif de l’entreprise, de la branche et des pouvoirs publics n’est pas clairement identifié dans la définition des besoins de compétences.

Instaurer un modèle de gestion de la main-d’oeuvre fondé sur la compétence suppose également que l’entreprise soit prête à jouer un rôle central dans la définition, l’évaluation et la reconnaissance de ces aptitudes. Elle devrait aussi articuler l’évaluation en continu de sa main-d’œuvre avec une politique interne de formation. En pratique :

  • seule une petite partie des entreprises paraît capable de mettre en œuvre une telle démarche ;
  • la gestion des compétences dans les transitions professionnelles est insuffisamment développée.

Quels scénarios de changement possible ?

 Première piste  : assurer l’insertion dans l’emploi et la continuité professionnelle 

Dans cette perspective, la formation initiale délivrerait les savoirs de base nécessaires à l’exercice d’une profession en donnant notamment une place centrale aux différentes formes d’alternance. La formation continue, quant à elle, serait conçue comme l’approfondissement ou la mise à niveau des compétences acquises en formation initiale.

Dès lors, la responsabilité sur les différentes phases d’acquisition des compétences se trouve davantage partagée entre le système éducatif, les partenaires sociaux et les entreprises. 

Dans un tel système, l’acquisition des compétences de base et génériques est confiée au système éducatif public pour les plus jeunes. A l’âge adulte, leur prise en charge ne relève pas de la responsabilité des employeurs mais d’une éducation permanente dont l’offre reste largement à structurer : au niveau du système éducatif, des acteurs territoriaux (régions, communes…) ou à l’initiative des partenaires sociaux (comme le certificat CléA). 

Deuxième piste : soutenir la capacité de mobilité professionnelle

Ici l’accent serait mis sur l’adaptabilité et la mobilité des personnes entre métiers via le marché externe du travail tout au long de leur vie active. Elle est donc axée sur l’acquisition de compétences de base et génériques dès le plus jeune âge, mais aussi de compétences disciplinaires non professionnelles permettant aux individus de faire face aux évolutions incertaines de l’emploi.

Le système éducatif est ici beaucoup moins professionnalisant. Il est recentré et redéployé sur le développement de compétences de base et des compétences disciplinaires générales, ainsi que sur les autres compétences génériques jugées nécessaires pour faciliter l’adaptabilité sur le marché du travail : coopération, travail en groupes interdisciplinaires, communication, autonomie, confiance en soi.

La professionnalisation passerait par la formation continue et relèverait de la seule responsabilité des entreprises, qui adapteraient les individus a priori dotés de compétences génériques à leurs besoins spécifiques.

L’investissement direct et individuel des entreprises se trouverait ainsi renforcé pour adapter les salariés au poste, ce qui passerait notamment par la formation en situation de travail. Cet effort pourrait être appuyé par l’Etat, sous la forme d’aides aux remplacements temporaires en cas de départ en formation des salariés.

Le rôle des partenaires sociaux se recentre alors sur l’accompagnement des mobilités. Ils mettraient en place des outils qui facilitent la reconnaissance entre entreprises de compétences professionnelles transversales et contriburaient à une information de qualité sur les opportunités existantes. Ils permettent ainsi un accompagnement individuel des parcours professionnels et participeraient activement à fluidifier les mobilités sur le marché du travail.

Quel que soit le scénario retenu, la question du contenu de l’offre de formation comme celle de son financement reste à débattre.

Consultez l’intégralité de l’étude de France Stratégie :
http://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/2017-2027-action-critiques-strategie-competences-web.pdf

Une réponse

  1. Avatar de Testud
    Testud

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